
Collection Verticales - Gallimard août 2018 - 288 pages
Paula Karst est une jeune fille assez quelconque avant d'intégrer, sans vocation mais avec une réelle motivation, l'institut supérieur de peinture décorative de la rue du métal, à Bruxelles. L'école forme des peintres spécialisés dans l'art du trompe-l'oeil. Après une période de doute, tétanisée par la peur de ne pas être à la hauteur, Paula prend de l'assurance et se montre suffisamment douée pour ne pas avoir à rougir devant ses camarades. Les premiers temps, elle ne sort pas beaucoup et ne noue pas de relations avec les autres élèves. Puis, elle se lie d'amitié avec son co-locataire et une autre jeune fille. Le trio, soudé, travaille d'arrache pied pour obtenir le diplôme.

Dans la seconde partie du roman, nous retrouvons Paula dans les débuts de sa carrière professionnelle. C'est un métier qui demande une grande mobilité si l'on veut travailler de façon continue. Nous suivons Paula dans ses différents chantiers, en France et à l'étranger. Au fil des expériences, elles gagne en professionnalisme. Elle acquiert une petite notoriété lui offrant des chantiers de plus en plus intéressants. Son métier la passionne, elle en fait le centre de sa vie et en oublie le reste : " Certes, elle rencontre des gens, oui, beaucoup, la liste de ses contacts s’allonge dans son smartphone, son réseau s’épaissit, mais prise dans un rapport économique où elle est sommée de satisfaire une commande contre un salaire d’une part, engagée sur des chantiers à durée limitée d’autre part, elle ne crée pas de relations qui durent, accumule les coups de coeur de forte intensité qui flambent comme des feux de paille sans laisser de trace, désagrégés en quelques semaines, chaleur et poussière."
Quand Maylis de Kerangal s'empare d'un domaine, elle en étudie toutes ses facettes et s'approprie le lexique technique, qu'elle utilise pour décrire avec précision l'univers qu'elle décrit. Cette fois encore, la langue est riche, précise, imagée. Du point de vue de l'écriture, on peut faire le parallèle avec "Réparer les vivants". La comparaison s'arrête-là. Le sujets est différent, les émotions ressenties à la lecture le sont aussi.

Je n'irai pas jusqu'au coup de coeur mais j'ai beaucoup apprécié ce roman d'apprentissage. J'ai aimé suivre l'évolution de la jeune Paula Karst, son quotidien d'élève puis de peintre en décors. Je ne connaissais pas du tout cet univers, assez particulier. J'ai trouvé très intéressante la réflexion sur ce qu'est l'artisanat (ou l'art ?) du trompe-l’œil. Est-on un artiste quand on copie les œuvres des autres ?
Si vous aimez l'écriture de Kerangal vous devriez pas être déçu par ce roman (sauf si vous le comparez à "Réparer les vivants", inégalable).
Un très bon roman

, 8/12