Folio (Gallimard 2001) - 540 pages - traduit de l'anglais par Serge Chauvin
"On a tendance à oublier à quoi ressemblaient vraiment les années soixante-dix. On se souvient des cols pelle à tarte et du glam rock, on évoque, avec des larmes dans les voix, les Monty Python et les émissions pour enfants, mais on refoule toute la sinistre étrangeté de cette période, tous ces trucs bizarres qui se passaient tout le temps. On se rappelle le pouvoir qu’avaient les syndicats à l’époque, mais on oublie comment réagissaient les gens : tous ces tordus militaristes qui parlaient de mettre sur le pied des armées privées pour rétablir l’ordre et protéger la propriété quand la loi ne serait plus en mesure de le faire."
Ce livre fait partie d'un triptyque dont le dernier tome, "Le coeur de l'Angleterre", est sorti récemment, près de 20 ans après le premier. Le thème de ce troisième tome, qui évoque notamment le Brexit m'intéresse beaucoup mais j'ai préféré commencer par le premier tome, qui dort dans ma PAL depuis plusieurs années.
Nous sommes plongés dans les années 70. Les personnages de l'histoire sont en terminale dans un Lycée de Birmingham. Amis ou ennemis, ils sont, pour la plupart, d'origine sociale élevée à l'exception de quelques très bons enfants d'ouvriers qui ont obtenu une bourse. Tous espèrent accéder l'an prochain à une très bonne université et se donnent les moyens d'y parvenir.
Tout au long de cette année scolaire que nous allons suivre, les adolescents vont se fréquenter les uns les autres. Certains font du sport, d'autres participent au journal de l'école. Leur conscience politique se forme, ils apprennent à confronter leurs idées. La censure existe peu, ce qui entraîne quelques tensions au sein de l'école quand certains élèves "se lâchent", mettant en cause des camarades, leurs parents ou encore des professeurs.
Nous suivons en arrière plan les histoires des parents. Lutte syndicale, tromperies conjugales, relations parents-enfants... Le roman faisant plus de 500 pages, Jonathan Coe a le temps de donner corps aux personnages secondaires. Il nous offre plusieurs histoires qui s’emboîtent habilement les unes dans les autres. Le ton, un brin nostalgique, m'a beaucoup plu.
Les états d'âmes et préoccupations des lycéens sont bien rendus, les personnages sont intéressants. En toile de fond, l'histoire de l'Angleterre de l'époque se dessine : les attentats perpétrés par l'IRA, une récession économique qui entraîne des conflits sociaux, le nationalisme, la montée des extrêmes...
Je lirai avec grand plaisir la suite des aventures de ces adolescents et notamment celle de Benjamin, que l'on suit de façon plus rapprochée.
Voilà un bon roman, dans lequel on installe confortablement pour remonter le temps.
animé par Lou - Titine - Lamousmé