Edtions de Minuit - 2009 - 282 pages
J’ai choisi ce livre attirée par les critiques dithyrambiques des médias mais aussi parce que j’avais beaucoup aimé le précédent roman de Mauvignier (Dans la foule).
Nous sommes dans la salle des fêtes d’un village de province. Solange a invité des proches à fêter ses 60 ans. Son frère Bernard (surnommé Feu-de-bois), clochard et alcoolique depuis de nombreuses années, est invité lui aussi mais jette un froid dans l’assistance, offrant à sa sœur un bijou de grande valeur alors qu’il est fauché. Il finit par gâcher la fête, insultant gratuitement un homme d’origine algérienne puis se rendant à son domicile, agressant sa femme. Pour comprendre ce comportement, il faut remonter au passé de Bernard qui a fait partie des jeunes gens appelés en Algérie dans les années 60, lors des « évènements ». Son cousin Rabut, était en Algérie en même temps que lui. L’incident de la salle des fêtes le replonge dans un passé dont il garde lui aussi le traumatisme à jamais. Il raconte…
Les premières pages m’ont déconcertée en raison du style, très particulier : voici un exemple un peu extrême (tout le livre n’est pas écrit ainsi, heureusement) : "Attendez, si je confirme. Si je. Que je. Vous voulez que je. Moi, que je dise. Et que je confirme oui, ici, ce qui s’est passé ici. On ne va pas parler de ça, pas ici, c’est pas possible, on va pas…" Je butte toujours sur ce genre d’écriture, qui me fatigue. Je dois dire en outre que la première moitié du livre est un peu décourageante, trop longue à mon goût.
Mais je ne regrette pas d’avoir persévéré car la seconde moitié est captivante. Il est vrai que je me sens concernée par le sujet, mon père fait partie de ces jeunes qui ont gâché une partie de leur jeunesse, acteurs d’une guerre dont la cause les dépassait totalement. Ils ne défendaient pas leur pays, contrairement à leur aînés et se trouvaient confrontés à une violence dont ils n’avaient même pas idée auparavant (On connaît aujourd’hui les pratiques utilisées dans chacun des deux camps). Il faut ajouter à cela l’ennui de longues heures passées à tuer le temps. Quand ils rentraient en France, ces jeunes se sentaient incompris et préféraient se taire et tenter d’oublier. Ce texte de Mauvignier nous éclaire sur ce silence et les blessures qu’il cache. Il se met dans la peau de ces hommes de façon admirable.
Un livre vraiment intéressant mais un gros bémol pour le style.
Stéphanie, de Landibiblog, nous explique ici son agacement (elle-aussi !) pour ce style particulier.
Aurore a eu un gros coup de coeur.
5/7