Babel - Lemeac (1995) - 286 pages
Voilà bien longtemps que je voulais découvrir Michel Tremblay, l'un des auteurs québécois les plus connus en France. J'ai choisi ce titre parmi d'autres car il est le premier tome d'un cycle : "Les Chroniques du Plateau Mont-Royal", dont j'avais entendu parler à de nombreuses reprises, notamment par nos amies blogueuses québécoises.
"La grosse femme d'à côté" nous entraîne dans un quartier populaire de Montréal, la journée du 2 mai 1942. Nous suivons les habitants du Plateau Mont-Royal dans leur quotidien. Une famille se place au centre de cette chronique, celle de la vieille Victoire qui, bien que quasi-impotente, a toujours le dernier mot dans la maison. Autour d'elle, ses enfants et petits-enfants. Cette famille habite un quartier haut en couleur avec ses querelles de voisinages et ses petites histoires, ancrées dans la grande histoire. Nous sommes en 1942, en pleine guerre mondiale. Une guerre suivie de loin par un pays qui subit les évènements sans se sentir vraiment concerné.
Les dialogues sont relatés en langue orale, ce qui permet, en quelque sorte, de lire "avec l'accent". Une petite idée de ce que cela peut donner : « Vous parlez tu-seule, à c't'heure ? » Rose se tenait dans la porte, la bouilloire à la main. « J'ai toujours parlé tu-seule parce que j'ai jamais rencontré parsonne d'assez intéressant pour y parler vraiment. » Mais l'effort de déchiffrage freine un peu la lecture, ce sera mon bémol. Un demi bémol toutefois car le texte perdrait une partie de son charme sans ces dialogues.
L'auteur met l'accent sur le regard que l'on portait à l'époque sur la maternité. : "Et quand une femme « un peu trop enceinte » passait dans la rue Mont-Royal, les regards se détournaient comme si elle avait été un objet obscène, honteux, et il se trouvait toujours une grenouille de bénitier ou un mangeux de balustres pour lui dire : « Le dernier mois, d’habetude, les femmes restent chez eux…" Cette année-là, à Montréal, de nombreuses femmes se trouvèrent enceinte. Certaines naissances étaient sans nul doute une stratégie mise en place par les couples pour éviter les départs à la guerre. L'héroïne "malgré elle" de cette histoire est la belle-fille de Victoire, "la grosse dame". Elle fait partie de ces femmes honteuses d'être enceintes, et ce d'autant plus qu'elle a 42 ans, un âge déplacé à l'époque pour attendre un bébé.
J'ai bien apprécié l'ambiance de ce roman, avec son humour sous-jacent, sa petite touche de fantastique, ses personnages hauts en couleur et ses dialogues pittoresques. Mais je n'ai pas trouvé la lecture très aisée : de nombreux personnages, une histoire qui n'en est pas vraiment une, une lecture ralentie par les dialogues québécois... Une découverte intéressante mais je ne suis pas certaine de lire les opus suivants.
Avez vous un autre livre de l'auteur à me conseiller en dehors de ce cycle ?
Lu dans le cadre de "Québec en septembre"
Hélène a lu le même titre