Livior - lu par Valérie Charpinet - 15 heures 40
Après avoir expérimenté les sites gratuits de classiques tombés dans le domaine public, j’ai tenté cette fois la lecture audio d’un livre plus récent, via « le livre qui parle » une « librairie sonore » sur internet, qui m’a proposé de découvrir un de leurs titres après avoir lu mon billet consacré à la lecture audio. Dans leur catalogue, j’ai choisi en téléchargement « Suite française », que je souhaitais lire depuis un bon moment. Le site propose également la vente de CD. J’ai beaucoup aimé l’interprétation de la comédienne et je dois dire que qualité du son est irréprochable. Ce n'est pas toujours le cas des sites gratuits (ce que l'on peut tout à fait comprendre).
Je connaissais un peu la vie d’Irène Némirovsky mais pas les conditions dans lesquelles ce livre avait été écrit, pendant la guerre, avant sa déportation à Auschwitz. L’auteure était juive. Le manuscrit a été miraculeusement sauvé après sa déportation et publié à titre posthume en seulement en 2004 grâce à une de ses filles. Il a obtenu le Prix Renaudot cette même année. La connaissance de ce contexte donne une dimension supplémentaire à cette œuvre, très émouvante et remarquablement écrite.
Deux parties forment « Suite française » mais Irène Nemirovsky, envoyée à la mort en pleine création, en avait prévu trois autres. L’œuvre finale aurait été une sorte de « Guerre et Paix ». Les deux textes (200 pages environ chacun) peuvent se lire indépendamment. L’un de l’autre et se suffisent à eux-mêmes mais on ne peut que déplorer l’absence parties manquantes. L’œuvre aurait été magistrale.
Dans « Tempête en juin », l’auteure raconte l’exode de juin 40. Nous suivons tour à tour différents personnages, de conditions et de caractères différents. Les défauts et qualités des uns et des autres se trouvent exacerbés durant l’épreuve. Chaque chapitre constitue une sorte de tableau. Et tous ces tableaux mis bout à bout constituent une fresque effrayante et superbe à la fois. L’âme humaine est mise en lumière sans concession.
Dans « Dolce » sommes maintenant en 41. C’est le temps de l’occupation. Pour illustrer cette période trouble et dérangeante, Irène Némirovsky choisit cette fois de nous conduire dans un village occupé par les allemands et plus particulièrement chez les dames Angelier qui hébergent contre leur gré un officier allemand. Lucile et sa belle-mère cohabitent difficilement. Mal mariée, Lucile supporte sans tristesse l’absence de son mari, prisonnier de guerre. L’officier allemand, cultivé et sympathique, finit par charmer Lucile sans toutefois celle-ci ne perde de vue qu’il est l’ennemi. Comme dans « tempête en juin » les caractères des uns et des autres sont décrits minutieusement. Les officiers allemands ne sont pas diabolisés. Ni pire ni meilleurs que leurs homologues français, ils sont présentés comme des victimes de la guerre, eux aussi… Quand on sait que le texte a été écrit « en direct », l’analyse et le recul d’Irène Némirovsky par rapport aux évènements sont très surprenants.
Cette « suite française », passionnante par son contenu, l’est plus encore par son écriture, superbe. J’ai été littéralement bluffée par le style irréprochable de cette femme d’origine russe, qui a appris le français avec sa gouvernante française.
A lire absolument ! Quant à moi, je n’en resterai certainement pas là avec l’œuvre d’Irène Nemirovsky.
Le billet d' Alice