Vous êtes sur le blog d'une lectrice passionnée qui aime partager ses lectures. N'hésitez pas à laisser un commentaire, que vous soyez vous-même blogueur ou pas. Vous pouvez aussi me contacter :sylir@orange.fr
Anouk a décidé de quitter sa vie à Montréal pour passer l'hiver seule dans une cabane abandonnée située dans la région de Kamouraska (au nord-est de Québec). Avec une température de - 40 degrés à l'extérieur, les conditions de vie sont difficiles. Nuit et jour il faut mettre du bois dans le poêle pour maintenir une température supportable.
Anouk savoure le calme du lieu et la beauté de la nature, qui contrastent avec la vie à Montréal qu'elle ne supportait plus. Dans sa cabane, elle a le temps de de penser au sens qu'elle voudrait donner à sa vie. Elle lit et écrit, bien que les loisirs passent en second plan quand on est en mode "survie". Parfois la solitude lui pèse et elle rêve d'un homme dans son lit.
"Encabanée se présente comme un journal de bord agrémenté de quelques dessins et de listes de pensées qui ne manquent pas d'humour. En voici un exemple :
Liste n° 117 :
Choses à ne pas oublier la prochaine fois :
- une bouillotte
- l'histoire des explorateurs morts gelés dans le grand Nord
- un sac de couchage -1000° C
- Tous les bas de laine en alpaga que j'ai donnés en cadeau en revenant du Pérou pour les enfiler les uns par-dessus les autres
- La meilleure bouteille de scotch d'Ecosse (sans glaçon)
- Un homme velu pour faire du peau à peau
La langue est truculente et le parlé québécois tout à fait compréhensible. Il est toutefois possible de vérifier le sens de certains mots dans le lexique proposé à la fin de l'ouvrage.
J'ai passé un très bon moment en compagnie de Fanny dans cette cabane au fin fond du Québec. J'adore entreprendre ce genre d'expérience par procuration. Tout en étant un roman d'aventure, "Encabanée" est un ouvrage à portée écologique qui prône un retour à un mode de vie plus proche de la nature.
D'après le livre de Thomas Piketty - 2022 - 176 pages
Cet ouvrage est inspiré de l'essai éponyme de l'économiste et écrivain français Thomas Piketti, spécialisé dans l'étude des inégalités économiques. L'ouvrage de Thomas Piketty fait 1197 pages, c'était donc un gros challenge de l'adapter en bande dessinée !
Pour rendre le propos plus digeste, Claire Alet et Benjamin Adam ont imaginé une saga familiale qui retrace l'évolution dans le temps de la répartition des richesses et modèles sociaux, sur une période qui s'étale de la Révolution à nos jours. Nous voyons comment la fortune de cette famille évolue au fil du temps. Plus on est riche et plus on s'enrichit ! Il est question du droit de propriété, de l'impact des impôts (l'impôt proportionnel étant plus favorable aux riches que l'impôt progressif), du rôle de l'esclavage puis de la colonisation dans l'acquisition des fortunes.
La famille que nous suivons vit de ses rentes jusqu'à 1914 puis peu à peu voit sa fortune diminuer en raison de la mise en place de l'impôt progressif et de l'effort demandé aux riches pour la reconstruction de la France. A partir de 1945, cette tendance s'accentue en raison de la nouvelle guerre, de l'inflation et crise de l'immobilier. Les membres de la famille se mettent à travailler, ne pouvant plus vivre de leurs rentes.
Durant les trente glorieuses, une société plus égalitaire voit le jour. Pour autant, des inégalités subsistent. Elles vont repartir à la hausse au cours des dernières décennies. Thomas Picketti, auteur engagé, ne croit pas à la théorie du ruissellement et pense qu'un autre modèle que celui de l'ultra-capitalisme est possible. Il donne quelques pistes de féflexion, certaines plus réalistes que d'autres.
J'ai trouvé cet ouvrage dense mais abordable et pédagogique. Il nous permet d'aborder l'histoire de notre pays sous un angle inhabituel. Je n'aurais pas le courage de lire un des essais de Thomas Piketti, je suis donc satisfaite d'avoir eu cette BD entre les mains (je remercie au passage mon voisin :-)). Le sujet n'est pas léger mais le format de la BD rend le propos plus accessible. Des petites pointes d'humour de temps en temps sont sont les bienvenues.
Il est difficile de restituer la lecture d'un ouvrage qui en résume déjà un autre. J'espère ne pas avoir été trop simpliste dans ma façon de le présenter.
Je conseille cette BD !
Lu dans le cadre de la BD de la semaine. Cette semaine chez Moka
Elsa vient d'avoir 18 ans. Nous sommes à la fin des années 90, l'ordinateur domestique est à ses débuts. Elsa échange par email avec ses amis et parfois avec des copains d'amis. C'est ainsi qu'elle fait la connaissance de Yann, avec lequel elle flirte à distance. Quand ce dernier lui propose de le rejoindre en Bretagne pendant les vacances d'été, elle accepte. Yann est plus âgé qu'elle. Il vit dans une caravane et fréquente des marginaux. Avec lui, Elsa fait des virées en bateau et côtoie l'univers punk.
"L'été à l'œuvre" est présenté comme un roman sur l'émancipation et c'est effectivement ainsi que je le qualifierai. L'ouvrage est composé de trois parties, qui correspondent à des périodes distinctes de la vie d'Elsa : "La traversée", "Contre-courant", "Amarrée". Nous découvrons, au fil de son introspection, à quel point cet été des 18 ans aura été fondateur pour la jeune fille.
J'ai aimé faire la connaissance d'Elsa. Plus mature que moi au même âge, elle fait preuve d'un certain discernement dans le choix de ses relations. Nous découvrons une galerie de personnages atypiques et attachants qui interagissent avec elle. L'écriture est fluide et addictive bien qu'il n'y ait pas de rebondissements spectaculaires.
J'ai lu cet ouvrage cadre d'une opération "Masse critique privilégiée" organisée par Babelio. C'est le nom de la maison d'édition qui m'a incitée à accepter la proposition. Les éditions Phébus sont pour moi gage de qualité. Ce n'est peut-être pas une lecture qui restera ancrée dans ma mémoire mais c'est un roman intéressant d'un point de vue sociologique et très agréable à lire.
Livre lu en 2024 : J'ai une vingtaine de livres lus l'an passés qui n'ont pas été chroniqués. Le format court va peut-être me permettre de me mettre à jour.
Alors que Fiona, juge aux affaires familiales, doit traiter un cas particulièrement délicat, son mari, qui se sent délaissé, décide d'aller voir ailleurs. Blessée, Fiona tente de continuer son travail comme si de rien n'était mais elle n'est pas en pleine possession de ses moyens. Sa fragilité du moment risque d'avoir un impact sur sa façon d'aborder les affaires.
Ce livre, assez foisonnant (plusieurs cas sont abordés) aborde la question de l'intérêt de l'enfant dans les affaires de justice. Certains dossiers sont si délicats qu'il est difficile d'avoir une opinion tranchée. Par ailleurs, un juge est un être humain qui peut traverser des moments difficiles. Les sujets concernant la justice et le fonctionnement de l'institution judicaire m'intéressent. Ce roman avait donc tout pour me plaire et ce fut la cas.
L'interprétation de la juge par la voix mature de Marie-Christine Barrault est judicieuse.
Gaël Faye est un musicien et écrivain Franco-rwandais né au Burundi en 1982. Je l'ai découvert en tant qu'écrivain, il y a huit ans, avec "Petit pays", un premier roman inspiré de sa propre histoire. Dans les deux ouvrages, il est question du génocide des Tutsis au Rwanda en 1994. Jacaranda est davantage centré que le précédent ouvrage sur l'après-génocide et ses conséquences sur les générations suivantes.
Le personnage central est Milan, que nous découvrons à l'âge de douze ans. Il vit en France dans une famille franco-rwandaise et ne connait rien de l'histoire de sa mère, rwandaise. Il découvre le génocide des tutsis à la télévision en 1994. Quelque temps après, débarque chez lui un jeune rwandais que sa famille va héberger quelques mois avant qu'il ne reparte brutalement dans son pays. Ce garçon s'appelle Claude et nous le retrouverons plusieurs années plus tard au Rwanda.
Parmi les autres personnages du roman, nous avons Stella, qui est née après les massacres mais dont la famille a été fortement impactée par le génocide. Les non-dits familiaux auront un impact très important sur sa santé mentale. Milan fait sa connaissance alors qu'elle est bébé et la verra régulièrement au cours de son enfance et adolescence. Ils ont pour point commun ne de pas avoir vécu les massacres mais d'en porter le poids malgré tout.
Jacaranda est un roman difficile à résumer car sa construction est assez complexe. Gaël Faye choisit de faire intervenir de nombreux personnages, sur quatre générations. Le récit passe plusieurs fois d'une époque à une autre et d'un personnage à l'autre. c'est un roman assez didactique qui s'attache à décrire des faits mais c'est aussi un roman très humain car nous accompagnons les personnages dans la découverte de leur histoire familiale. Il est également question du vivre ensemble après le génocide. Comment continuer à vivre aux côtés des bourreaux de nos proches sans les haïr, sans être tenté de se venger ?
Plusieurs fois au cours de ma lecture j'ai eu un sentiment d'abattement et d'écœurement en mesurant, une fois encore, ce que des êtres humains sont capables d'infliger à leurs semblables. Serons-nous un jour capables de retenir les leçons du passé ? Je veux croire que ce type d'ouvrage apporte sa pierre à l'édifice et je vous en conseille sa lecture. En dépit de sa construction un peu complexe, c'est un livre qui se lit aisément.
René Frégni est un auteur que je suis depuis des années et que je prends toujours beaucoup de plaisir à lire. C'est avec grand intérêt que j'ai lu ce recueil d'entretiens réalisé avec Fabrice Lardreau, écrivain et journaliste. Trois parties composent l'ouvrage. Dans "La ville", l'auteur évoque son enfance marseillaise. Dans "la route" il nous raconte sa jeunesse et notamment les années passées sur les chemins de France et d'ailleurs. Dans la dernière partie "le pays bleu", il nous parle de sa vie en Provence et de sa passion pour l'écriture. Des extraits de ses livres de chevet terminent l'ouvrage, accompagnés d'un commentaire personnel sur chacune de ces œuvres.
L'auteur a une écriture très sensuelle que je craignais de ne pas retrouver dans un recueil d'entretiens. Je me trompais. Dès les premières lignes j'ai retrouvé avec bonheur la sensualité de sa plume et ses mots savoureux. L'écrivain nous conduit sur les traces de son enfance à Marseille, où il a passé plus de temps à fuir l'école qu'à la fréquenter. C'est à l'école de la vie qu'il a tout appris ainsi qu'avec sa mère, avec laquelle il entretenait une relation quasi-fusionnelle. Avant de se consacrer à l'écriture, René Frégni a travaillé dans un hôpital psychiatrique. Cet univers à part l'a fortement marqué. Durant sa vie d'adulte, il a animé des ateliers d'écriture dans les prisons. Cette expérience lui a beaucoup appris sur la nature humaine.
Une partie des livres de René Frégni est d'inspiration autobiographique, je connaissais donc les grands lignes de sa vie et son amour pour la nature provençale, qu'il ne se lasse pas de partager avec ses lecteurs. L'ouvrage m'a permis d'explorer plus en détail les sources d'inspiration de son œuvre. Ceux qui connaissent déjà René Frégni auront certainement un grand plaisir à lire ce recueil d'entretiens. Si vous ne connaissez pas l'écrivain, ce livre peut être une entrée en matière pour découvrir son univers. Vous pouvez également lire ses œuvres.
Alba, linguiste de métier, achète un grand terrain dans un village isolé sur lequel se trouve une maison. Elle a pour projet d'y planter 5600 arbres pour compenser son empreinte carbone. En effet, elle a dû beaucoup voyager pour son travail. Alba rencontre les habitants, s'intègre à vie du village et s'attache à un jeune réfugié désireux de perfectionner son islandais.
Audur Ava Olafsdottir a une façon bien à elle de raconter des histoires en prenant des chemins détournés. On ne distingue pas au départ ce qui est important de ce qui relève de l'anecdote. De nombreuses digressions linguistiques ajoutent du charme au roman tout en brouillant les pistes. Le puzzle prend forme peu à peu mais il faut poser la dernière pièce pour avoir une vision d'ensemble.
Je me suis plongée avec délice dans ce roman qui se déguste comme un petit bonbon bien qu'il aborde des sujets qui sont loin d'être légers comme celui de l'écologie, par exemple. Alba est une femme attachante, riche d'un monde intérieur qui lui permet de vivre seule mais qui n'est pas une ermite pour autant. Au fil des lignes nous comprenons que l'achat de cette maison n'a pas comme seule motivation un acte écologique.
Un roman très plaisant à lire, comme tous ceux de l'autrice.
Anaïs Nin est une écrivaine des années 30 dont je connaissais la vie dans les grandes lignes, avant de parcourir cette BD. J'ai lu, il y a très longtemps, une sélection de ses journaux intimes. J'étais curieuse de découvrir comment Léonie Bischoff allait s'y prendre pour rendre compte, par le dessin, de la complexité de cette femme.
Anaïs Nin est une femme peu conventionnelle, surtout pour l'époque. Elle laisse libre cours à sa sexualité, aimant autant les femmes que les hommes. Mariée, elle mène plusieurs relations en parallèle. Léonie Bischoff évoque notamment la relation à la fois charnelle et intellectuelle qu'elle entretient avec Henry Miller, dont elle était très amoureuse.
La dessinatrice dessine ses fantasmes, ses états d'âmes et le côté obscur de sa personnalité. Les dessins sont très recherchés, il ne s'agit pas seulement de décrire des lieux, des personnages et des situations mais aussi de sonder les âmes torturées, notamment celle de Anaïs Nin. Cette dernière ne se débarrasse pas du jour au lendemain de la morale qu'on lui a inculquée. C'est tout un cheminement, qui passe notamment par la psychanalyse.
L'utilisation des couleurs plus ou moins lumineuses selon les situations nous permet de capter les ambiances. Une des scènes particulièrement dérangeante est dessinée sur fond noir, par exemple. J'ai lu que cet album était le fruit d'un travail de longue haleine qui avait demandé à son autrice des années de réflexion et d'essais avant d'arriver à trouver la bonne approche. Le résultat est époustoufflant.
C'est un album vraiment très abouti que nous propose Léonie Bischoff !
Participation à la BD de la semaine (liens chez Fanny cette semaine)
DRH senior au chômage depuis plus de quatre ans, Alain Delambre accepte des petits boulots tout en continuant à répondre, sans succès, à des annonces qui correspondent à son profil. Un jour, il est convoqué à un entretien et parvient à accéder à l'étape suivante du processus. On lui demande de participer à un jeu de rôle. Les dirigeants ont imaginé une prise d'otages dans laquelle les cadres de l'entreprise seront testés. Comme il n'a rien à perdre, Alain accepte de collaborer à ce jeu ahurissant qu'il prend très au sérieux...
"Cadre noir" est un roman noir qui ne manque pas d'humour. Les rebondissements sont jubilatoires, je me suis bien amusée. Mon plaisir de lecture a été amplifié par le talent de conteur de Pierre Lemaitre qui lit merveilleusement bien ses textes. Mais attention, ce livre n'est pas que drôle ! Pierre Lemaitre dénonce les dérives d'un management sans éthique, pratiqué par des dirigeants pour lesquels la fin justifie les moyens.
A l'occasion du mois anglais sur les blogs, je prends enfin le temps de rédiger un billet sur ce roman, que j'ai lu il y a quelques mois. L'histoire se passe en grande partie à Bournville (au sud-ouest de Birmingham ), fief historique du chocolatier britannique Cadbury.
Après un prologue qui nous plonge en mars 2020, en plein covid, nous remontons le temps jusqu'en 1945. Le roman est découpé en chapitres qui reprennent des faits marquants : le couronnement de la reine en 1953, la finale de la coupe de football en 1966, l'investiture du Prince Charles en 1969, le mariage de Charles et Diana en 1981, la mort de Diana en 1997 et enfin le 75ème anniversaire de la victoire de 1945, en 2020.
L'auteur nous montre que la royauté ne fait pas l'unanimité au sein de la population anglaise. Entre fascination et dégoût, chacun a son opinion sur le train de vie royal et sur les frasques des monarques. L'évolution des mœurs au sein de la famille royale suit celle du reste de la population, avec toutefois un certain décalage.
A travers l'histoire d'une famille anglaise "lambda", nous observons l'évolution des mentalités au fil des années. Nous verrons que cette famille assez rigide devra s'adapter à la libération les mœurs. Une part belle est faite à la vie économique en suivant l'histoire de la chocolaterie Cadbury qui subira les hauts et les bas de l'économie anglaise (en lien notamment avec les relations du Royaume Uni avec l'Union Européenne). Nous observons également la famille s'adapter aux progrès technologiques qui vont bousculer les modes de vie : l'avènement de la télévision, d'internet...
En résumé, voilà une bonne occasion de revoir l'histoire contemporaine de l'Angleterre de façon agréable et instructive. Ce fut pour mois belle découverte, dans le prolongement de l'œuvre de Jonathan Coe. Je conseille !