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Cette superbe BD raconte la rencontre entre deux femmes, Mona et Monika. La première est une réfugiée syrienne qui vit dans une tente près de l'aéroport désaffecté d'Héraklion. La seconde est la sage-femme qui lui annonce qu'elle est enceinte. Entre les deux femmes nait immédiatement une forte complicité.
Nous les suivons toutes les deux dans leur quotidien. Mona la syrienne cherche un pays d'accueil pour élever son futur enfant pendant que Monika rêve d'une vie où elle et son mari auraient les moyens de prendre leur autonomie. En raison de la crise économique grecque, l'époux de la sage-femme n'a pas de travail. Incapables de subvenir à leurs propres besoins, ils sont contraints de vivre chez les beaux-parents,
Ce roman graphique a vu le jour suite à la participation de Sandrine Martin au projet ERC, une initiative qui a pour but de vulgariser en images les recherches scientifiques. La dessinatrice a suivi Vanessa Grotti, une anthropologue qui étudie la maternité des migrantes enceintes dans les régions frontalières de l'Europe.
Le personnage de Mona, fictionnel, reprend les caractéristiques et expériences de différentes femmes suivies par l'anthropologue. Il en est de même pour Monika, qui symbolise la sage-femme confrontée à la précarité des femmes migrantes alors qu'elle-même peine à vivre décemment dans son pays en pleine crise économique.
Je qualifierai cet ouvrage de docu-BD, un genre que j'affectionne tout particulièrement. le dessin fait passer beaucoup de messages et en dit plus long que n'importe quel discours. Nous suivons des femmes dans leur quotidien. Elles ont des noms et ne font plus partie de la foule anonyme dont nous déplorons le sort dans les journaux télévisés.
Sandrine Martin fait ressortir de son dessin, en bichromie bleu et rouge, beaucoup d'humanité. J'ai été touchée par la bienveillance de la sage-femme envers sa patiente. C'est une très belle profession qu'elle met en lumière et si importante pour toutes les femmes du monde ! Le dessin, très précis, porte un soin tout particulier aux décors, qui en disent beaucoup sur ce que vivent les personnages.
J'ai eu coup de cœur pour cette BD que j'ai déjà envie de relire.
Quai Voltaire 2018 - traduit de l'anglais par Anouk Neuhoff - 229 pages
"Non, mieux vaut avoir un amant quand on est jeune qu'une névrose quand on est vieille. En effet, si on a des amants quand on est jeune, une fois vieille, tout ce que diront les gens, c'est qu'on a eu plein d'hommes. Ils seront sans doute jaloux, mais la jalousie, on peut faire avec. Tandis que si on se contente d'un substitut, alors, une fois vieille, les gens diront : "Elle est folle, la pauvre. Elle est complètement piquée : elle s'est mise en tête d'élever des poulets", ou que sais-je."
J'aime beaucoup participer au mois anglais mais cette année, je prends le train en marche (c'est mon premier billet). Trop occupée par ma vie personnelle, je n'ai pas réussi à lire autant que je l'aurais voulu. J'ai trois romans à vous présenter d'ici la fin du mois, dont celui-ci.
Nous faisons la connaissance de Clare, une jeune femme qui ne parvient pas à s'épanouir dans sa vie conjugale. Son premier mari, plus âgé qu'elle, ne s'intéressait qu'aux femmes mûres alors que son mari actuel, Jonathan, se montre trop possessif. Clare a souhaité prendre du recul. Le couple est momentanément séparé. Un troisième homme, Joshua, entre dans sa vie. Elle le prend comme amant mais nous verrons qu'à "l'usage", il ne répondra pas non plus à ses attentes.
Une l'ambiance délicieusement surannée se dégage du roman. L'ouvrage, bien que publié récemment, a été écrit dans les années 1970. Comme la majorité des femmes de sa génération, Clare se soucie peu d'une éventuelle carrière professionnelle. Elle est centrée sur son couple et le foyer qu'elle rêve d'avoir, sans toutefois se résigner à des relations médiocres pour éviter le divorce. En cela, elle a (il me semble) de l'avance sur son époque. Nous découvrons, à la fin du roman, un épisode douloureux de la vie de Clare qui nous fait regarder la jeune femme différemment.
J'ai eu un petit coup de cœur pour le personnage de Madame Fox, une femme âgée que Clare a rencontré dans un parc londonien. Toujours de bonne humeur et d'une éducation irréprochable, Madame Fox est une amie attentionnée sur laquelle Clare peut compter, bien que leur amitié soit toute récente. J'ai aimé prendre le thé en leur compagnie, écoutant les confidences de l'une et de l'autre.
Depuis quelques années, en ce qui me concerne, pas de mois anglais sans Angela Huth. J'aime sa façon de décrire les relations de couple et je me délecte de l'ambiance so-british de ses romans. L'histoire n'a rien d'extraordinaire mais j'ai passé un bon moment dans la peau de Clare, loin des préoccupations qui sont les miennes.
Audiolib 2021 (Actes Sud) - 14 h 57 - lu par Vincent Schmitt
La quatrième de couverture :
"Pour les besoins d’une thèse sur « la vie à la campagne au XXIe siècle », l’apprenti ethnologue David Mazon a quitté Paris et pris ses quartiers dans un modeste village fictif au bord du Marais poitevin. Logé à la ferme, bientôt pourvu d’une mob propice à ses investigations, s’alimentant au Café-Épicerie-Pêche et puisant le savoir local auprès de l’aimable Maire – également fossoyeur –, le nouveau venu entame un journal de terrain, consigne petits faits vrais et moeurs autochtones, bien décidé à circonscrire et quintessencier la ruralité.
Mais déjà le Maire s’active à préparer le Banquet annuel de sa confrérie – gargantuesque ripaille de trois jours durant lesquels la Mort fait trêve pour que se régalent sans scrupule les fossoyeurs – et les lecteurs – dans une fabuleuse opulence de nourriture, de libations et de langage. Car les saveurs de la langue, sa rémanence et sa métamorphose, sont l’épicentre de ce remuement des siècles et de ce roman hors normes, aussi empli de truculence qu’il est épris de culture populaire, riche de mémoire, fertile en fraternité."
Une fois n'est pas coutume, je vous livre la quatrième de couverture. Ayant abandonné le roman en cours d'écoute, je ne me sens pas capable d'en faire un résumé complet. Mon écoute était pourtant bien partie. Je me suis plongée rapidement dans le roman et suivi avec intérêt l'installation de l'ethnologue dans sa location à la ferme. J'ai aimé recueillir ses premières impressions sur le village et sur ses habitants. Le lecteur, Vincent Schmitt, utilise un ton enjoué qui donne envie d'en savoir plus. J'avais apprécié sa prestation d'interprète dans "Jeux de miroirs" mais aussi dans "Immortelle randonnée".
Hélas, j'ai déclaré forfait au bout de deux heures environ, écoutant en complément quelques extraits par-ci, par-là, histoire de ne pas avoir de regrets. Je n'ai pas eu la patience d'écouter la description détaillée du fameux banquet annuel des fossoyeurs "façon Rabelais" ni les nombreuses digressions sur réincarnation des âmes, assez déroutantes. C'est dommage car j'étais curieuse de découvrir la méthode de travail d'un ethnologue et l'étude sur les mœurs rurales aurait pu m'intéresser. Je reconnais que Mathias Enard est érudit mais je le préfère de loin dans un registre moins élitiste. Je pense notamment à "Rue des voleurs" , que j'avais adoré.
Un abandon ! J'avais abandonné également "Boussole", le précédent roman de l'auteur...
Audiolib 2021 - traduit par Jean Esch - Lu par Benjamin Jungers
Jack McEvoy est un chroniqueur judiciaire du Rocky Mountain News. Quand son frère jumeau, inspecteur de police, est retrouvé mort dans sa voiture de service et que l'enquête conclut au suicide, Jack décide de faire des recherches en vue d'écrire un article. Il ne peut se résoudre à l'idée que son frère se soit suicidé. Certes, l'enquête qu'il menait lui donnait du fil à retordre mais il ne croit pas un instant que l'homme ait pu se supprimer. Pour les besoins de son article, il se plie en quatre pour avoir accès aux données du FBI qui font état d'une vague de suicides récents chez les policiers. Il se fait accepter de l'équipe qui investigue sur le sujet et apporte (plus que) sa contribution à l'enquête, qui s'avère extrêmement complexe.
Le rythme de la première partie du roman est assez lent. L'auteur prend le temps d'installer son histoire et de nous présenter les protagonistes, développant largement leurs états d'âme. Le rythme s'accélère dans la seconde partie. L'enquête se corse, les fausses pistes se multiplient mais Jack avance, inexorablement, vers la résolution de l'énigme. Du moins le croit t'il car les apparences sont parfois trompeuses...
Le poète est un roman que j'ai lu à sa sortie en France, en 1997. Je me souviens avoir apprécié ma lecture mais ce n'est pas le genre de roman que je relis habituellement. Il faut dire que je ne suis pas une grande amatrice de polars et que, de façon générale, je ne cherche pas à me replonger dans un ouvrage déjà lu. En le relisant plus de vingt ans plus tard, je ne me suis pas ennuyée une seconde car j'avais oublié l'intrigue et heureusement le dénouement. Je suis contente d'avoir vécu l'expérience en audio, histoire de varier les plaisirs. Dans ce genre de roman, de construction plutôt classique, je préfère une lecture assez sobre et sans fioritures. C'est le cas de l'interprétation de Benjamin Jungers, que j'ai beaucoup appréciée.
Audiolib 2020 (Quidam Editeur) - 4 h 08 - lu par Françoise-Eric Gendron
Taqawan est un ouvrage original, qui allie le roman et le documentaire. En toile de fond, nous découvrons la réserve de Restigouche, en Gaspésie (Québec). Nous entrons dans le domaine des indiens mig'mag qui peinent à garder vivantes leurs traditions ancestrales et notamment la pêche au saumon. En juin 1981, la Sûreté du Québec mène des rafles dans la réserve afin de faire respecter les limitations que l'état impose à cette pêche. Les mig'mag ne l'entendent pas de cette oreille, cette activité étant pour eux une source de revenus. Ils ne comprennent pas les restrictions, d'autant qu'ils sont, depuis toujours, respectueux de leurs ressources. La colère s'empare de la population...
Dans ce contexte, une adolescente prénommée Océane disparait de la réserve. Elle est retrouvée quelques jours plus tard, prostrée, par un agent de la faune qui n'en peut plus des violences exercées contre les mig'maq. Avec l'aide d'une institutrice et d'un indien qui vit à l'écart de la tribu, il vient en aide à la jeune fille. Le récit prend la dimension d'un polar quand les agresseurs d'Océane se lancent à sa recherche bien décidés à récupérer leur "butin".
J'ai pris beaucoup de plaisir à écouter Taqawan en dépit d'un petit bémol concernant l'interprétation. Dans certains dialogues, le lecteur imite l'accent québécois et cela ne sonne pas très juste. J'écoute régulièrement les livres lus par de vrais québécois, je ne suis donc pas passée à côté de cette petite fausse note dans l'interprétation. Mais contrairement à Enna (sans doute parce que j'étais prévenue), cela ne m'a pas trop perturbée et j'ai pleinement profité de mon écoute. J'ai aimé le côté documentaire "soft" de l'ouvrage et l'intrigue m'a tenue en haleine.
Philippe Rey 2012 - 238 pages - traduit de l'italien par Nathalie Bauer
"C'était peut-être le milieu qui nous avait produits. On avait peut-être ça dans le sang. C'était peut-être les gens qu'on fréquentait, l'ennui, l'absence de buts. Le certitude de ne pas pouvoir évoluer, la prise de conscience de l'inéluctable. Dehors, les années se succédaient, et le monde changeait. Au fond de nous-mêmes, on restait figés.
On n'avait pas de raison de vivre, on n'était pas capables d'en trouver une. On vivait, un point c'est tout."
Nous sommes dans les années 70-80 dans le quartier miséreux d'une ville italienne nommé "La forteresse". S'entassent ici les laissés-pour-compte de la ville qui squattent les logements vides et vivent des minimas sociaux. La famille de Béatrice est un peu moins pauvre que les autres familles. Les deux parents ont un travail. Dans l'immeuble, au dessus de chez eux, vivent un père et ses fils. La mère est décédée, le père est violent. La famille de Béatrice recueille souvent le jeune Alfredo, qui finit par faire partie de la famille. Béatrice et Alfredo sont inséparables tout en se disputant sans arrêt. Au fil du temps leur relation évolue mais aucun d'eux n'est prêt à se l'avouer. Alfredo passe difficilement le cap de l'adolescence, accablé par un fardeau familial qui devient de plus en plus lourd. Béatrice porte le jeune homme à bout de bras et finit pas se consacrer entièrement à lui, pour le meilleur et pour le pire.
"Le bruit de tes pas" nous place en immersion dans une Italie pauvre des années 70 qui offre peu de perspectives à ses jeunes. J'ai éprouvé beaucoup de sympathie pour la narratrice et j'ai lu son histoire le cœur serré. Nous savons dès le début qu'une tragédie va survenir mais nous n'en connaissons ni la cause ni les circonstances. Un certain suspens nous tient donc en haleine jusqu'à la fin, très émouvante. L'écriture est fluide et la façon de raconter l'histoire, sous la forme une longue confidence, m'a beaucoup plu. Cerise sur le gâteau, l'objet-livre est très agréable à regarder et à parcourir. Vous l'avez compris, tout est réuni pour passer un très bon moment de lecture. J'avais noté ce titre après avoir lu plusieurs avis élogieux sur les blogs et le hasard l'a mis sur mon chemin il y près de deux ans. Je l'ai ouvert à l'occasion du mois italien et je me réjouis de cette bonne pioche.
Audiolib 2021 (Finitude) - 12 h 07 - Lu par Damien Witecka
Les années 1990 préfigurent un système sur le point de perdre tout contrôle, où l'informatique s'apprête à révolutionner la planète, où les algorithmes emballent la combinatoire des transactions boursières. Plus personne ne sait vraiment ce qu'est devenu l'argent, un moyen, un but, un prétexte, une dématérialisation de nos existences.
Nous sommes à la fin des années 80, en Suisse, dans le monde de la finance. L'argent "en transit" est convoité par des arrivistes sans scrupules, qui ne reculent devant rien pour tenter de faire fortune. C'est le cas d'une jeune banquière, Svetlana et d'un prof de tennis-gigolo prénommé Aldo. Qui se ressemblent s'assemblent, ils tombent amoureux l'un de l'autre. L'amour aurait pu leur faire passer le goût de l'argent mais pas du tout !
Bien que je lui trouve des qualités, j'ai eu du mal à rester concentrée sur ce roman jusqu'au bout. Le monde de la finance ne me fait pas rêver et accompagner des personnages plus cyniques les uns que les autres pendant plus de 12 heures n'a pas été simple pour moi. J'ai perdu le fil plus d'une fois. C'est grâce au lecteur, excellent, que je n'ai pas abandonné mon écoute en cours de route. Damien Witecka a trouvé le ton adéquat pour faire ressortir l'humour noir qui se dégage de l'ouvrage. La dernière partie, plus rythmée, tient en haleine. Tout compte fait, même si certains moments ont été laborieux, je ne regrette pas d'avoir persévéré.
Une satire du monde de la finance, présenté comme un univers impitoyable et superficiel.