Editions Dialogues.FR - février 2010 - 192 pages
Le livre :
Le titre et le sous titre de ce roman annoncent parfaitement la couleur : « Mordre la poussière - Tentative d’explication du XXIème siècle en neuf nouvelles ». Si vous n’avez pas idée de la cruauté de la société dans laquelle nous vivons, ce livre vous mettra la réalité bien en face. Dans un ton mordant et ironique, l’auteur évoque les travers de notre époque. Le monde de l’entreprise est particulièrement épinglé pour l’immoralité qui y règne, hélas, trop souvent. « La connerie, l’hypocrisie, le sadisme, les pires sentiments humains tapaient dur au bureau. Mon gilet pare-balles, j’allais devoir apprendre à en doubler les mailles. Il faut ce qu’il faut. » Il est question également de la précarité du travail, des conditions de vie déplorables dans nos prisons, de la difficulté de publier un livre...
Deux nouvelles sont un peu différentes des autres : « La geôle », qui n’a pas la touche d’humour noir qui caractérise les autres nouvelles, et « le mari de la femme invisible » qui, à l’inverse, se place sur le registre de l’humour et de l'absurdité, sans avoir pour but de dénoncer quoi que soit de particulier. Elle m’a bien fait rire cette nouvelle-là, malgré sa chute assez scabreuse. Ma préférée est « la péniche ». Il est question d’un séminaire organisé sur une péniche pour les salariés d’une entreprise commerciale. Le narrateur, qui déteste ce genre de manifestation (hum... je le comprends), y va à reculons. La soirée se terminera pour lui de façon plutôt… mouillée.
Malgré la dureté des sujets traités, j’ai souvent ri (parfois jaune) et lu avec grand intérêt ces nouvelles dont le ton correspond assez bien à mon sens de l’humour. Elles évoquent toutes des thèmes auxquels je suis sensible. Les situations décrites sont bien souvent caricaturales (mais si peu, hélas, dans certains cas). Le constat qui vient à l’esprit en fermant le livre est affligeant : notre société se porte bien mal !
Quelques mots sur la rencontre :
Voilà une dizaine de jours, dans le cadre d'un petit-déjeuner littéraire, l’auteur était accueilli par la bibliothèque municipale de Landivisiau. Dominique Julien est professeur de philosophie dans un lycée de la ville. Il nous a expliqué que ce livre était une commande de la jeune maison d’édition « Dialogues.fr ». Il a consacré à l'écriture de ces neuf nouvelles quatre mois de travail intensifs, appréciant que l’éditeur, Charles Kermarec, s'investisse dans le projet en l’orientant et le conseillant. Petit détail qui a son importance : il a été payé (apparemment ce n’est pas toujours le cas). Il regrette le peu de billets dans la presse, contre laquelle il a la dent dure. Il a évoqué les copinages divers et variés qui ne donnent aucune chance aux auteurs peu connus d’avoir une chronique dans un journal. Seule la presse locale a parlé de son livre.
Les personnes présentes avaient diversement apprécié le livre, certaines lui reprochant un langage un peu trop oral. Dominique Julien a reconnu que ce style pouvait gêner certains lecteurs (à titre personnel, je fais partie de ceux que cela n’a pas gêné le moins du monde). Les nouvelles sont inspirées pour la plupart de sa propre expérience. Il a connu la précarité, exerçant notamment le métier de facteur intérimaire à la poste. Les sujets de la précarité de l’emploi et des conditions de travail de plus en plus difficiles dans les entreprises l’interpellent et le révoltent. Il avait déjà écrit sur le sujet par le passé.
J’ai bien apprécié ce petit-déjeuner rencontre, heureuse initiative de Stéphanie (qui a eu la gentillesse de ne pas me jeter dehors quand j’ai renversé le contenu de la cafetière en voulant discrètement me servir un café). Je remercie également au passage Dominique Julien, si par hasard il tombait sur ce billet, de nous avoir accordé un peu de son temps.
Vous pouvez écouter (et voir) l'auteur sur le site de Dialogues.
Les avis d' Yvon et de Choupynette (enthousiastes également)